Fort des résultats obtenus sur la consommation de produits jugés nocifs pour la santé comme le tabac, l’alcool et les boissons sucrées, le gouvernement français pourrait poursuivre ses efforts afin d’élargir son objectif de santé publique en touchant aux aliments trop gras et trop salés.
Le gouvernement français a bien des possibilités pour influer sur l’alimentation de la population. En effet, par le passé déjà, députés et sénateurs se sont penchés sur la question et ont par exemple proposé une augmentation de la taxation des produits trop gras et trop salés.
Dès 2014, un rapport du Sénat rédigé par la sénatrice UMP, Catherine Deroche, et son homologue PS, Yves Daudigny, recommandait ainsi de faire passer la TVA sur les boissons sucrées de 5,5 % à 20 % afin de compenser la baisse de la TVA de 20 % à 5,5 % sur des produits agroalimentaires de consommation courante comme la farine, les huiles ou la margarine.
Plus récemment, en 2016, un rapport parlementaire publié par les députés Véronique Louwagie (LR) et Razzy Hammadi (PS) faisait également mention d’une autre mesure qui viserait à passer de 5,5 % à 20 % la TVA sur les barres chocolatées, permettant à l’État d’économiser 50 millions d’euros par an.
Selon les députés auteurs de cette mission, « rien ne justifie […] que l’avantage d’une TVA à 5,5 % soit accordé à un type de produit de grignotage comportant des quantités de sucres et d’acides gras saturés particulièrement élevées. »
Simplifier et éclaircir la législation pour un meilleur résultat
Plus largement, ces derniers ont souhaité remettre de l’ordre et de la clarté dans le maquis de plus d’une vingtaine de taxes frappant spécifiquement les produits alimentaires. Comme ils l’ont relevé, cette situation est le résultat d’une accumulation historique « d’impositions créées au fil de l’eau » ayant « conduit non seulement à un paysage fiscal peu lisible […], mais aussi à une complexité administrative excessive ».
Ainsi, en 1967, lorsque les pouvoirs publics ont décidé de créer une taxe sur les « huiles végétales destinées à l’alimentation humaine » (olive, tournesol, colza, soja, etc.), le raisonnement du législateur était en fait d’inciter les Français à consommer davantage de beurre produit sur le territoire national…
En France, la plupart des produits alimentaires sont soumis à un taux réduit de TVA de 5,5 %. Seuls les bonbons, certains chocolats, le caviar et la margarine sont touchés par un taux à 20 %. Le beurre est donc presque quatre fois moins taxé que la margarine. Or, d’après les auteurs du rapport, il n’existe aucune raison médicale de conserver cette différence de traitement. Il s’agit d’une décision prise à l’origine pour favoriser la filière laitière française…
Autre signe d’une volonté de légiférer au-delà des boissons sucrées, la vingtaine de propositions émises par un rapport sénatorial publié en 2020. Les sénateurs y suggèrent de taxer les aliments avec une « mauvaise qualité nutritionnelle » et de contraindre l’industrie agroalimentaire à concevoir des plats moins sucrés, salés et gras.
Constatant que les Français consomment globalement trop de calories et trop de viande au regard des besoins nutritionnels, de leur santé et de celle de la planète, ce rapport de la délégation sénatoriale à la prospective prône donc une alimentation « plus sobre et plus végétale ».
Pour ce faire, les rapporteurs, la sénatrice LREM de la Gironde Françoise Cartron et le sénateur PS du Finistère Jean-Luc Fichet, suggèrent d’inciter ou d’obliger « à la reformulation des recettes des plats industriels (limitation de sel, de sucre ou de graisses saturées) ».
Ils proposent également de « taxer, sur le modèle de la taxe soda, certains aliments en raison de leur mauvaise qualité nutritionnelle (par exemple ceux classés D ou E dans le Nutri-Score) et utiliser le produit de ces taxes pour financer des actions d’éducation nutritionnelle ou pour distribuer des chèques “alimentation saine”, sur le modèle du “chèque énergie”, permettant par exemple d’acheter des fruits ou des légumes frais ».