Populations les moins aisées et les moins diplômées qui fument le plus
La hausse de la fiscalité du tabac n’empêche pas les différences de prévalence du tabagisme quotidien entre les différentes catégories socio-professionnelles. En 2020 ce sont toujours les populations les moins aisées et les moins diplômées qui fument le plus.
Les différentes politiques publiques de lutte contre le tabagisme, qu’il s’agisse de campagnes de prévention ou de hausse des taxes sur le tabac sont loin d’avoir les mêmes résultats dans l’ensemble de la population. La prévalence du tabagisme diffère en effet sensiblement selon les catégories socio-économiques. C’est ce que note les résultats du baromètre de Santé Publique France sur la consommation de tabac parmi les adultes en 2020. Globalement, après une diminution du nombre de fumeurs entre 2014 et 2019, les chiffres se sont stabilisés en 2020 avec 31,8 % de fumeurs chez les adultes de 18 à 75 ans et 25,5 % de fumeurs quotidiens.
Moins on est diplômé, plus on fume
En revanche les différences restent marquées selon le niveau de diplôme. Ainsi, le tabagisme quotidien a augmenté chez les titulaires d’un baccalauréat, passant de 22,4 % à 26,9 % tout comme chez les personnes n’ayant aucun diplôme (35,8 % contre 32 % un an plus tôt). A contrario, chez les personnes diplômées, le nombre de fumeurs quotidiens poursuit la décrue entamée il y a 20 ans, leur part étant passée de 27,8 % en 2000 à 17,3 % en 2020. Des différences qui se manifestent également en fonction des revenus, la prévalence du tabagisme quotidien chez les personnes aux revenus les plus bas étant passée de 29,8 % à 33,3 %, tandis que ce taux n’est que de 18 % chez les plus aisés. « Le constat reste le même en 2020 que les années précédentes : plus le revenu est élevé, plus la prévalence du tabagisme quotidien est faible », constate Santé Publique France.
Des différences sensibles entre les catégories socio-professionnelles
Les différences entre les catégories professionnelles confirment les constats en matière de formation et de revenus. Si l’on enregistre une stabilité du tabagisme entre 2019 et 2020 chez les 18-64 ans toutes activités professionnelles confondues, les différences restent très marquées selon les catégories étudiées. Une augmentation de la prévalence du tabagisme chez les plus précaires qui ne semble pas s’expliquer par le confinement, puisqu’elle s’est produite durant les mois précédant la mise à l’arrêt de la France. En revanche, analyse Santé Publique France « Cette hausse s’inscrit dans un contexte de crise sociale en France qui a démarré fin 2018, avec le « mouvement des gilets jaunes », marqué notamment par une contestation des inégalités socio-économiques. Cette crise a fortement concerné les populations de plus faible niveau socio-économique. Or parmi les populations les moins favorisées, la cigarette pourrait être utilisée pour gérer le stress ou pour surmonter les difficultés du quotidien, malgré le coût de plus en plus important de ce produit ». Une analyse qui fait notamment référence à une étude de 2009 (1) conduite en France sur la période 2000-2008 qui analyse pourquoi les fumeurs les moins aisés sont moins sensibles aux augmentations du prix des cigarettes que les autres.
Logiquement, la hausse des taxes sur le tabac pèse donc davantage sur le budget des ménages les moins riches et les moins diplômés sans pour autant permettre un recul franc de la consommation. Sans doute faut-il voir là l’une des limites de la fiscalité comportementale en matière de tabagisme. En tout cas la question se pose.
(1) Peretti-Watel P, Constance J. “It’s all we got left”. Why poor smokers are less sensitive to cigarette price increases. Int J Environ Res Public Health. 2009;6(2):608-21.