L’évaluation de l’impact des politiques de taxation sur les décisions des individus a fait l’objet de nombreux travaux empiriques. D’autres facteurs que la fiscalité comportementale influencent en effet les résultats.
Évaluer l’impact d’une taxation sur la consommation implique de calculer une élasticité qui mesure la variation de la consommation suite à la variation du prix du bien. L’élasticité “prix” mesure ainsi l’effet d’une évolution du prix sur la consommation d’un produit. Dans cette optique, plus l’élasticité est élevée, plus la variation du prix a un effet important sur la consommation.
Une efficacité partielle, mais réelle
Dans le cas de la mise en place d’une taxation comportementale, la mesure de l’élasticité permet de prévoir l’évolution de la consommation et le montant des recettes fiscales attendu. Celui-ci sera d’autant plus élevé que l’élasticité “prix” sera petite. De fait, la majorité des travaux effectués sur le tabac, l’alcool et les produits sucrés montrent un lien entre l’évolution du prix et l’évolution de la consommation de ces biens. Ces résultats sont toutefois plus nuancés lorsqu’il s’agit d’établir l’impact de la hausse du prix sur le comportement de chacune des catégories de consommateurs et, a fortiori, lorsqu’il s’agit d’établir un lien entre l’évolution de ce prix et l’état de santé des populations. À titre d’exemple, certaines études montrent que le tabagisme adolescent serait insensible au prix des cigarettes et que d’autres variables (l’âge, l’origine ethnique, le fait de vivre dans une famille monoparentale, le niveau d’éducation des parents, les performances scolaires, et le fait d’être soi-même dans un environnement de fumeurs) seraient plus importantes que le prix dans l’initiation au tabac.
En revanche, des chercheurs ont établi que le niveau de consommation des jeunes fumeurs est clairement affecté par les prix. Conclusion, le prix des cigarettes est bien un instrument efficace pour dissuader les jeunes de fumer, mais pas pour les empêcher de commencer.
Subventions et primes à l’achat sous étroite surveillance
La dépense, notamment sous forme de subvention ou de prime à l’achat, est l’autre mécanisme financier incitatif. Mais ce type de dépense fiscale s’apparente davantage à un manque à gagner difficile à évaluer. Elles font donc l’objet d’un suivi particulier dans le cadre de l’examen des lois de finances par le Parlement. Ainsi la loi du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2018 à 2022 encadre et plafonne le recours à ces “dépenses fiscales ». On notera néanmoins que plusieurs études suggèrent que les mesures comportementales fondées sur une hausse des droits d’accises ou des taxes sur la valeur ajoutée seraient fondamentalement régressives – le taux moyen de ces impositions diminuant à mesure de la hausse des revenus. Les chercheurs ont en effet constaté sur l’année 2008 que l’ensemble des taxes indirectes (alcool, tabac, TVA) représentait 16,63 % du revenu disponible brut des 10 % des ménages les moins aisés.
La fiscalité comportementale est un outil particulier, le Conseil constitutionnel assure en plus un contrôle approfondi de l’adéquation entre l’assiette ou le taux d’imposition choisis par le législateur et l’objectif que cette mesure incitative ou dissuasive est censée poursuivre, en se fondant tant sur le principe d’égalité devant la loi fiscale que sur le fondement de l’égalité devant les charges publiques.