Taxer l’alcool pour sauver des vies ? Retour sur le Minimum Unit Pricing écossais
La mise en place d’un prix unitaire minimum pour l’alcool en Écosse a marqué un tournant dans la lutte contre ses méfaits. Depuis 2018, cette mesure montre des résultats prometteurs en santé publique. Cependant, elle continue de susciter des débats sur ses limites et son adoption potentielle dans d’autres pays.
Une mesure pionnière aux ambitions claires
L’Écosse a été le premier pays à instaurer un prix minimum par unité d’alcool, fixé à 0,50 £ (environ 0,58 €). L’objectif était de cibler les boissons bon marché et à forte teneur en alcool. Ces produits sont souvent consommés par les populations vulnérables. Des données solides soutiennent cette politique : augmenter le prix de l’alcool peut réduire sa consommation, en particulier chez les gros buveurs.
Des résultats significatifs pour la santé publique
Un rapport de Public Health Scotland en 2023 a révélé des effets notables. Entre 2018 et 2021, les ventes d’alcool ont diminué de 3 % en volume d’alcool pur. Le cidre (-21,5 %) et le poiré (-31,3 %), boissons bon marché, ont été particulièrement impactés.
Les bénéfices sur la santé publique sont aussi significatifs. Les décès imputables à l’alcool ont baissé de 13,4 %, et les hospitalisations liées à l’alcool ont diminué de 4,1 %. Ces progrès sont plus marqués chez les hommes et dans les zones défavorisées, les plus touchées par l’alcoolisme.
Des impacts économiques limités
L’impact économique sur l’industrie de l’alcool a été faible, malgré les craintes initiales. Les détaillants ont compensé la baisse des ventes par l’augmentation des prix. Les profits n’ont pas chuté de façon notable. Ces résultats rassurent les acteurs économiques et encouragent d’autres pays à envisager des mesures similaires.
Des critiques et des défis persistants
Un effet limité sur les populations dépendantes
Malgré son efficacité générale, le MUP a peu d’impact sur les buveurs dépendants à faibles revenus. Ces derniers, moins sensibles à la hausse des prix, pourraient voir leur situation s’aggraver à cause de leur précarité.
Une politique perçue comme régressive
Le MUP est critiqué pour son effet régressif. Il touche davantage les ménages modestes, qui consacrent une plus grande part de leur revenu à l’alcool. Ces critiques mettent en lumière la nécessité d’un accompagnement, par exemple via des aides au sevrage ou des subventions pour les plus vulnérables.
Un risque d’inégalités régionales
Le MUP appliqué à l’échelle nationale pourrait aussi creuser les disparités régionales. En Écosse, les différences de prix avec les régions voisines, comme l’Angleterre, favorisent les achats transfrontaliers.
Une évolution nécessaire pour maintenir l’efficacité
Pour contrer l’inflation et préserver les bénéfices, le Parlement écossais a décidé d’augmenter le MUP à 0,65 £ (environ 0,75 €) en 2024. Cette hausse vise à maintenir l’effet dissuasif sur la consommation.
En parallèle, il est essentiel de cibler les personnes dépendantes. Cela inclut des programmes de sevrage intensifs et une meilleure prise en charge des maladies liées à l’alcool.
Une source d’inspiration pour d’autres pays ?
L’expérience écossaise attire l’attention à l’international. En Angleterre, les décès liés à l’alcool ont augmenté de 10,8 % entre 2019 et 2022. Cette hausse pousse certains à réclamer un MUP. Les données montrent que cette mesure pourrait avoir un impact notable sur la consommation et ses effets négatifs.
Sources :
LaGalaxieSénat – 15/10/2024 https://www.senat.fr/rap/r23-638/r23-63824.html
ScottishGovernment – 17/05/2024 https://www.gov.scot/news/minimum-unit-pricing-rise-1/