À l’issue des élections européennes du 9 juin 2024, l’observatoire de la fiscalité comportementale a réalisé un état des lieux sur la fiscalité comportementale dans les domaines de la santé et de l’énergie. Cet état des lieux vise à comprendre comment les différents États membres utilisent les politiques fiscales pour impacter les comportements des citoyens, réduire les risques pour la santé publique et promouvoir des choix plus durables et responsables.
Fiscalité comportementale et la santé
TABAC
En février 2020, la Commission européenne a publié une évaluation du fonctionnement de la directive 2011/64/UE. Cette évaluation visait à déterminer si les taux d’accise appliqués aux tabacs manufacturés avaient protégé la santé publique et garanti le bon fonctionnement du marché intérieur.
Le grand nombre de fumeurs dans l’UE reste une préoccupation majeure : 26 % de la population adulte de l’Union et 29 % des jeunes Européens âgés de 15 à 24 ans sont concernés.
De nombreux États membres ont régulièrement augmenté les taxes sur les produits du tabac pour réduire le tabagisme. Par exemple :
- En 2021, l’Allemagne a introduit une nouvelle taxe sur les produits de tabac chauffé, alignant ces produits sur les taux de taxation du tabac traditionnel. Cela inclut une augmentation pluriannuelle des taxes sur les cigarettes, s’élevant à environ 50 centimes par paquet.
- En 2022, l’Irlande a imposé la taxe la plus élevée de l’UE sur les cigarettes, avec un taux d’accise de 9,30 € par paquet de 20 cigarettes.
- En 2024, la France a progressivement augmenté le prix des cigarettes pour atteindre 11 euros par paquet. La France fait partie des pays de l’OCDE où le prix du paquet de cigarettes est le plus élevé.
Le Luxembourg prévoit une hausse de 2,7 % des accises sur les produits du tabac, avec une taxation des tabacs à chauffer à hauteur de 35 euros par kg. Le Luxembourg introduira également des taxes sur les alternatives au tabac à partir du 1er octobre 2024, avec un droit d’accise plafonné à 200 euros par litre pour les e-liquides et de 100 euros par kg pour les sachets de nicotine.
Ces mesures visent à réduire la consommation de tabac et à encourager des choix de vie plus sains au sein de l’UE, tout en harmonisant les politiques fiscales entre les États membres.
ALIMENTATION
En France, depuis 2018, une taxe appelée la “taxe soda” est modulée en fonction de la quantité de sucre ajouté dans une boisson.
Cette taxe sur les boissons contenant des sucres ajoutés ainsi que celles sur les boissons édulcorées a permis en 2023 d’assurer des recettes budgétaires d’un montant de 43 millions d’euros pour la première et de 443 millions d’euros pour la seconde. Toutefois, selon le rapport sur la fiscalité comportementale soumis au Sénat par la sénatrice centriste Elisabeth Doineau, et la sénatrice communiste, Cathy Apourceau-Poly, ces taxes ont eu un effet limité sur la hausse des prix et donc sur la consommation finale de ces produits.
BOISSONS ALCOOLISÉES
Le 29 juillet 2020, le Conseil a adopté une série de nouvelles règles (directive 2020/1151 du Conseil) modifiant la directive 92/83/CEE relative à l’harmonisation des structures des droits d’accise sur l’alcool et les boissons alcoolisées, applicables depuis le 1er janvier 2022.
Les taux minimaux d’accise sont ajustés pour certaines catégories de boissons alcoolisées afin de refléter les réalités économiques actuelles et d’assurer une concurrence équitable au sein de l’UE. Cette harmonisation concerne les catégories suivantes :
- Bières
- Vins
- Autres boissons fermentées
- Produits intermédiaires
- Alcool éthylique
Les États membres peuvent appliquer des taux réduits aux petits producteurs de bière et de spiritueux, y compris ceux qui produisent moins de 50 000 hectolitres de bière par an ou 10 hectolitres d’alcool éthylique par an.
ENERGIE
En juillet 2021, la Commission européenne a proposé une révision de la Directive sur la Taxation de l’Énergie (DTE) dans le cadre du paquet « Fit for 55 ». Cette révision vise à aligner la fiscalité sur les objectifs climatiques de l’UE en fixant des taux de taxation basés sur l’impact environnemental réel des carburants. Les points clés de la révision incluent :
- Restructuration des taux minimaux de taxation : Les nouveaux taux seront établis en fonction du contenu énergétique (exprimé en euros par gigajoule) et de la performance environnementale des combustibles, carburants et de l’électricité, au lieu du volume utilisé actuellement. Cela fournira des signaux de prix plus clairs aux entreprises et aux consommateurs, les encourageant à choisir des sources d’énergie plus propres et plus économes.
- Catégorisation des produits énergétiques : Les produits seront regroupés par type selon leur contenu énergétique et performance environnementale, garantissant que les combustibles les plus polluants soient les plus taxés.
- Ajustement des taux minimaux : Les taux seront ajustés annuellement en fonction des prix de consommation d’Eurostat pour refléter les prix les plus récents.
- Fin des exonérations pour certains carburants : Le kérosène utilisé dans l’aviation et l’huile lourde dans le secteur maritime ne bénéficieront plus d’exonérations fiscales pour les voyages intra-UE, en raison de leur impact environnemental significatif.
Le 1er janvier 2023, la nouvelle loi 7/2022 sur les déchets et sols contaminés est entrée en vigueur. Elle introduit des mesures fiscales pour encourager l’économie circulaire et réduire l’impact environnemental des emballages plastiques. Les produits concernés par cette taxe incluent :
- Les emballages non réutilisables contenant du plastique vierge.
- Les produits semi-finis en plastique destinés à la production de ces emballages.
- Les produits en plastique vierge utilisés pour fermer, commercialiser ou présenter les emballages non réutilisables.
Le 1er octobre 2023, l’Union européenne a mis en place la phase transitoire du Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF), aussi connu sous le nom de « taxe carbone aux frontières ».
Ce mécanisme impose un surcoût pour les importateurs de fer, d’acier, de ciment, d’engrais, d’aluminium, d’électricité et d’hydrogène lors du franchissement des frontières européennes. La mise en place complète de cette taxe se fera progressivement jusqu’en 2034, visant à verdir les importations industrielles de l’UE.